Stop au jeu de dupe des prix cassés et aux salaires non conventionnels
Une société polonaise démarche les entreprises suisses pour offrir des travailleurs à 11 euros, TVA et charges sociales comprises. Un prix encore indiqué comme négociable… Devant la presse, Unia a contacté la société et dénoncé la manœuvre, hélas rendue possible par un système actuel de protection des salariés très largement insuffisant.
Rappel du contexte actuel en Suisse Le Conseil fédéral a refusé les propositions syndicales pour renforcer les mesures d’accompagnement à la libre circulation. C’est un très mauvais signal donné, alors que les abus des employeurs se multiplient sur le terrain, notamment dans le domaine de la construction. La situation à Genève Les carences du dispositif légal actuel mettent à disposition du patronat une main d’œuvre bon marché et dont la précarité assure la docilité. Pour mieux comprendre les mécanismes en place, voici une brève présentation de ce «mille-feuille» de l’exploitation : · Externalisations : Les entreprises externalisent les travaux à des sous-traitants. L’entreprise qui sous-traite se garantit au moins 20% de bénéfice sur les contrats. La pression des prix, elle, est reportée sur les salaires. · Intérimaires : La péjoration des conditions de travail s’est encore accélérée par le truchement des sociétés d’intérim. Certaines grandes entreprises de la construction ont créé leur propre agence temporaire et licencient leurs propres employés pour les réengager comme temporaires. L’hiver, ces employés sont renvoyés à la maison puis réengagés en mars. · Insuffisance des mesures d’accompagnement : Dernière couche du mille-feuille, l’utilisation des travailleurs détachés qui se succèdent à coups de 90 jours sur les chantiers et qui peuvent être payés quelques euros par jour. De passage, parfois entassés dans des logis sordides, ils ne font même plus concurrence à la main d’œuvre locale tant leurs salaires sont dérisoires. Unia accuse A Genève, nombre de chantiers sont assurés par des entreprises étrangères, qui paient le salaire en vigueur dans le pays d’origine. Elles donnent pour consigne aux travailleurs de ne pas divulguer leur revenu et fournit des fiches de salaire indiquant les salaires suisses à l’intention des contrôleurs et des syndicats. Une autre méthode consiste à inscrire les travailleurs comme indépendants. Nous trouvons de chantiers avec des dizaines de travailleurs «indépendants», qui travaillent tous pour la même entreprise et le même chef. Les entreprises viennent pour des travaux, par exemple de 6 mois, mais comme les travailleurs détachés ne peuvent rester que 90 jours, elles les font travailler la nuit, le samedi, le dimanche sans autorisation. Comme ces entreprises savent qu’elles n’auront pas l’autorisation, elles vont jusqu’à budgétiser les amendes, celles-ci leur revenant moins chères que de respecter les salaires locaux. A titre d’exemple, lors de l’action de ce jeudi 24 septembre, Unia dénonce une société proposant sur le marché genevois des travailleurs polonais à 11 euros brut de l’heure, charges sociales et TVA comprises… Un prix dont l’offre mentionne qu’il est encore négociable! Cette déviance a été rendue possible par la bienveillance de toute la chaîne économique du bâtiment : autant les entreprises sous-traitantes que les maîtres d’ouvrages (parmi lesquels les collectivités publiques) ferment pieusement les yeux sur des devis irréalistes, ceci à seule fin d’obtenir le travail à moindre coût. Ça doit changer Pour cesser cette grande hypocrisie, Unia réclame : · Le renforcement des mesures d’accompagnement. · Des négociations avec la Société suisse des entrepreneurs (SSE) pour inscrire dans la convention collective du secteur principal de la construction des mesures efficaces de protection contre la sous-enchère et un dispositif de limitation du recours aux travailleurs temporaires. Unia Région Genève Annexe: offre de services de la société polonaise. Pour plus d'informations: José Sebastiao, secrétaire responsable du Second œuvre, 079 717 11 98 Yves Mugny, secrétaire responsable du secteur de la Construction, 079 293 11 61