Les livreuses et livreurs exigent que Smood assume ses responsabilités

En moins de deux ans, les livreuses et livreurs de Smood sont victimes de leur deuxième licenciement collectif. Cette fois-ci, c’est au tour de l’entreprise de location de service Simple Pay qui fournit le personnel à Smood de licencier 218 personnes sans plan social. Tout porte à croire que Simple Pay fera bientôt faillite avec des arriérés de salaire dus au personnel. Unia exige que Smood assume ses responsabilités de véritable employeur et que Migros, en qualité d’actionnaire principal, soutienne les salarié-e-s.

À l’heure où s’achève la procédure de consultation obligatoire en cas de licenciement collectif, autant Smood que Simple Pay se renvoient la balle sur leurs responsabilités. Les deux entreprises refusent de payer les arriérés de salaire dus aux livreuses et livreurs. Alors que Simple Pay occupait plus de 1000 personnes fin 2021, elles refusent autant l’une que l’autre de répondre à l’obligation légale de conclure un plan social. Lors d’une conférence de presse qui a eu lieu ce matin, Roman Künzler, responsable logistique et transport chez Unia, a souligné que « le personnel fait l’objet d’une manœuvre de Smood visant à se soustraire à ses obligations. En effet, Simple Pay, qui lui a fourni son personnel de livraison jusqu’ici, est entré dans des difficultés économiques en raison des injonctions des autorités de se mettre en conformité ». Or, Smood refuse de payer à son partenaire l’augmentation de l’enveloppe salariale qui en découle. Un épisode similaire a déjà eu lieu au printemps 2021 avec l’entreprise Allo Service, partenaire de Smood.

Smood doit être reconnu responsable

Christian Dandrès et Caroline Renold, avocat-e-s des grévistes, expliquent le procédé : « Lorsque Smood refuse de payer la note de Simple Pay pour respecter les décisions des autorités administratives, Simple Pay fait faillite. Simple Pay est une coquille vide qui a été créée pour que Smood ne soit pas en relation de travail directe avec les livreuses et les livreurs. Dès lors, il faut rechercher le véritable employeur : Smood est responsable des prétentions des employé-e-s de Simple Pay. Des requêtes seront déposées en ce sens contre Smood devant les tribunaux. »

On rappelle que depuis 2018, Simple Pay pratique un « paiement à la minute » : les livreuses et les livreurs sont payés uniquement pendant le temps d’une livraison, et non pendant le temps d’attente, pratique considérée comme illégale, notamment par la CRCT (Chambre collective des relations de travail) et contraire à la loi régissant la location de service, pourtant minimaliste. Le syndicat Unia estime la dette de Smood/Simple Pay auprès de son personnel à au moins 10 millions de francs en salaire, assurances sociales et frais professionnels.

Des revendications claires de la part des livreuses et livreurs

Employé de Simple Pay, Maher a également fait part des revendications des personnes licenciées : « Nous refusons d’être laissés sur le carreau par la faillite de Simple Pay alors que nous avons travaillé pour Smood. Nous voulons la garantie que toutes nos heures travaillées ainsi que nos frais professionnels seront intégralement payés. Les autorités nous ont donné raison sur toute la ligne. Nous exigeons aussi un plan social avec la création d’un job center ainsi que des possibilités de reconversion professionnelle. En ce moment-même, nous attendons le paiement du salaire d’août. Smood bloquerait cet argent à notre détriment. » Ces revendications ont été établies lors de plusieurs assemblées générales organisées par le syndicat Unia et soumises autant à Simple Pay et à Smood qu’à Migros, qui a aussi son rôle à jouer.

Responsabilité sociale de Migros Genève engagée

Helena de Freitas, secrétaire régionale adjointe d’Unia Genève souligne : « Nous avons interpellé Migros Genève pour l’alerter sur la situation. En tant qu’actionnaire majoritaire, elle détient 46% des actions de Smood. Nous attendons donc qu’elle pèse de tout son poids pour débloquer la situation et parvenir à un accord équilibré. Il serait incompréhensible qu’elle cautionne les pratiques socialement irresponsables et juridiquement douteuses de Smood et de Simple Pay. »

Le licenciement collectif de l’ensemble du personnel de livraison employé à Genève et sur l’Arc lémanique montre une nouvelle fois les dégâts que peuvent causer un modèle d’affaire reposant sur l’ubérisation et la surexploitation. Déterminé à mettre un terme à ces dérives, le personnel continue à s’engager avec Unia pour le respect de ses droits. Le syndicat se félicite que dorénavant, les livreuses et livreurs employés par Smood seront payés à l’heure. Cette avancée a été rendue possible grâce à la grève de 36 jours qui a eu lieu l’année passée.