La limitation du travail temporaire est une mesure de politique sociale

Les syndicats se battent depuis des années contre le travail temporaire à outrance sur les chantiers. La Chambre constitutionnelle du canton de Genève leur donne raison en confirmant que la limitation du travail temporaire est une mesure de politique sociale. Un arrêt important, qui reconnaît en filigrane la précarisation des conditions de travail induite par le développement continu du recours au travail temporaire sur les chantiers.

Bref historique

A la suite de plusieurs dénonciations effectuées par les syndicats, le Grand Conseil adoptait le 28 janvier 2022 une modification de la loi autorisant le Conseil d’Etat à adhérer à l’accord intercantonal sur les marchés publics (L-AIMP). Dans la foulée, le Conseil d’Etat adaptait son règlement d’application avec deux mesures fortes à la clé. D’une part, il s’agissait de limiter le recours au travail temporaire avec un maximum de 20% de travailleurs intérimaires par entreprise exécutante sur un même chantier. D’autre part, la révision légale consacrait la responsabilité de l’entreprise générale durant toute la durée des travaux, en la chargeant de procéder à des contrôles réguliers du nombre de travailleurs temporaires engagés.

Saisie d’un recours par plusieurs entreprises actives dans la location de service, la Chambre constitutionnelle a rejeté le 16 février 2023 leurs nombreuses doléances en reconnaissant notamment que:

  • La disposition légale ne viole pas l’AIMP car elle précise et renforce uniquement les critères de sélection de dossiers pour des marchés publics;
  • La disposition légale est conforme à un instrument de politique sociale car elle vise à lutter contre l’effet de précarisation du travail temporaire;
  • Les restrictions à la liberté économique sont donc conformes aux dispositions constitutionnelles.

Une étape importante dans la lutte contre la précarisation des conditions de travail

Cet arrêt vient ainsi confirmer la bataille conduite depuis des années par les syndicats de la branche contre le recours de plus en plus étendu au travail temporaire dans le domaine de la construction. Le risque accru d’accidents du travail pour des employés soumis à la pression d’une embauche fixe est en effet reconnu, de même que l’inégalité de traitement dans l’accès à la retraite anticipée pour des travailleurs souvent renvoyés au chômage sans délai à la moindre baisse de commandes, un phénomène largement observé durant la crise Covid. Les syndicats saluent dès lors cette décision comme une avancée majeure contre la précarisation des conditions de travail ainsi qu’une reconnaissance du droit à un travail digne pour les ouvriers qui bâtissent notre canton.

Forts de cette décision, les syndicats poursuivront le combat, car la présente décision ne s’appliquera qu’aux marchés publics. La limitation du travail temporaire sur les chantiers privés reste un enjeu majeur. La lutte continue !