Patron et candidat au Grand-Conseil, il anticipe la fin hypothétique du salaire minimum légal dans la restauration !
Basée à Vernier, l’entreprise Swisscanonica emploie près de 300 personnes dans des aéroports du monde entier, de San Francisco à Dubaï en passant par Newark et Genève. Avec la reprise du secteur aérien suite à la pandémie, l’entreprise se vante d’avoir renoué avec de très bons résultats. Sur son site Internet, Swisscanonica indique réaliser un chiffre d’affaire de plus de 50 millions de francs suisses dans ses 20 points de vente.
Des voix patronales discordantes
Le salaire minimum est remis en question par la motion Ettlin. Une proposition qui ne met pas d’accord tous les patrons... D’un côté, il y a la faitière de l’hôtellerie, qui se veut rassurante. Dans la Tribune de Genève du 12 janvier 2023, le nouveau président de la Société des hôteliers genevois, Jean-Vital Domezon, plaidait, dans le cas d’une hypothétique entrée en vigueur de la motion Ettlin, en faveur du statu quo, soit le maintien du salaire minimum légal. De l’autre, il y a la réalité du terrain. Un certain nombre de patrons peinent à calmer leurs ardeurs. Plusieurs années avant une éventuelle entrée en vigueur d’une loi découlant de la motion Ettlin, un de ces patrons confirme les craintes des travailleurs-euses au sujet de son application. Dans les starting-blocks, certains n’attendent que de baisser les salaires.
Une anticipation exagérée
Malgré les bons résultats de l’entreprise, certain-e-s employé-e-s du site genevois ont été fortement incités à signer des avenants aux contrats de travail anticipant des baisses de salaire. Un retour au salaire en vigueur en 2022, soit CHF 21.48 de l’heure, y est annoncé au cas où la loi Ettlin serait instaurée. De nouveaux employé-e-s de cette même entreprise, se sont vu proposer des contrats de travail anticipant un retour au salaire minimum de la Convention collective de travail pour l’hôtellerie-restauration (CCNT), soit une baisse mensuelle d’environ CHF 500.-. Dans les deux cas, les contrats stipulent que les salaires contractuels ne sont pas garantis. De plus, les employé-e-s se voient privés du droit de contester les nouveaux salaires. Des dispositions dont la légalité est plus qu’incertaine !
Un long processus législatif au résultat incertain
Il est pourtant très incertain que cette motion aboutisse à une loi. Le Conseil fédéral est en effet chargé de faire une proposition afin d’appliquer le principe voté avec deux voix d’écart en décembre dernier par le Conseil national : là où des Convention collectives de travail étendues existent, les salaires minimaux cantonaux ne doivent plus être appliqués. Cela mettrait fin à Genève et Neuchâtel, au salaire minimum légal cantonal dans les secteurs de l’hôtellerie restauration, du nettoyage, de la coiffure ou encore de la boulangerie. Mais le chemin jusqu’à une éventuelle entrée en vigueur de la revendication de cette motion est encore long : les Chambres fédérales devront valider la proposition du Conseil fédéral, qui, le cas échant, sera soumise au référendum facultatif… De nombreuses années nous séparent donc d’une éventuelle application !
Une avidité démesurée ?
Alors que le chef de file de la liste Libertés et Justice sociale, Pierre Maudet, déclarait le 6 mars dernier lors d’un débat RTSinfo avoir pris acte du vote de la population au sujet du salaire minimum, il ne semble pas que ses candidat-e-s soient au diapason en la matière. Bien au contraire, la volonté de l’entreprise de Vincent Canonica de revenir sur cet acquis social est tout à fait contraire au principe de justice sociale. Ce que l’on pourrait interpréter comme de la cupidité ne l’a pas empêché, quelques semaines après la signature de ces avenants, d’envoyer à tous ses employé-e-s un e-mail les invitant à le soutenir dans la course au Grand Conseil.
Des droits syndicaux bafoués
Les employé-e-s de Canonica à l’Aéroport international de Genève tiennent également à dénoncer la pression qui a été exercée sur elles/eux par des responsables hiérarchiques suite aux tractages syndicaux invitant à la réunion de ce jour. Il n’est en effet pas acceptable que des responsables déchirent des dépliants syndicaux, menacent des salarié-e-s d’avertissement, menacent de prendre contact avec l’établissement où l’assemblée était prévue pour annuler la réservation ou passent devant la salle de réunion pour intimider le personnel.
Pour le salaire minimum légal et les droits syndicaux
Les syndicats SIT et UNIA rappellent que le salaire minimum est un progrès social incontestable. Mis en place sans provoquer le cataclysme économique prédit par les milieux de l’économie, le salaire minimum légal a permis à des milliers de travailleurs-euses de secteurs précarisés de vivre plus décemment, sans avoir à recourir à des aides sociales. Les deux syndicats dénoncent la pratique de Swisscanonica et réclament l’annulation immédiate des avenants aux contrats imposant une baisse de salaire dans le cas où une loi Ettlin serait édictée. Les deux syndicats réclament la garantie du maintien des salaires au niveau du salaire minimum légal genevois et le respect des droits syndicaux.
Ils invitent par ailleurs la population à signer la pétition qu’ils ont lancée afin de combattre la motion Ettlin !