Rolex SA : Dénonciations de harcèlement et mobbing
Face à des cas de harcèlement et de mobbing ainsi qu’au licenciement de certaines personnes qui avaient dénoncé ces situations, dont une particulièrement choquante, le syndicat Unia Région Genève a organisé ce matin une conférence de presse avec sept travailleuses et travailleurs.
Quatre ex-travailleuses et travailleurs de Rolex sont venus témoigner aujourd’hui. Ils ont rapporté ce qu’ils ont vécu au sein de l’entreprise. Pour avoir osé prendre la parole, certains ont été mis à l’écart et ont subi le mépris de supérieurs et des ressources humaines. Dans le pire des cas, des personnes ont été licenciées.
Malgré de nombreuses remontées aux supérieurs et aux ressources humaines, depuis des années, la situation au sein du secteur mondial était devenue très difficile pour nombres de travailleurs-euses. Ne supportant plus les brimades et autres pressions, parfois même du sexisme, certaines personnes ont quitté l’entreprise exténuées et très impactées dans leur santé.
Les ex-salarié-e-s ont témoigné de pressions constantes, du dénigrement et du manque de considération des ressources humaines des faits remontés.
Citation de Nathalie* : «J'ai subi durant des années de la part du directeur de département des propos déplacés, sexistes. Lors d'une sortie d’entreprise, dans un bar, j'ai eu droit à des questions sur mes sous-vêtements. J'en ai informé les RH à la suite de quoi le responsable m'a dit que "ce que vous me dites là me surprend, on m'a toujours dit que j'étais quelqu'un de chaleureux..." On m'a demandé si j'avais des preuves et j'ai eu droit à des attaques sans fondements.»
Cas individuel particulièrement scandaleux
Pire, un salarié, Eric*, qui avait dénoncé et remonté ces informations depuis des années aux ressources humaines s’est vu mis à l’écart dans un premier temps par ses responsables. A la suite de l’intervention d’Unia, un suivi de son cas a été mis en place et le syndicat a accompagné le salarié dans les séances avec les RH. Le secrétaire responsable de la Branche horlogerie à Genève a accompagné trois fois le salarié en question. Une enquête interne, puis externe, ont été menées. Par ailleurs, certains salarié-e-s, lassés de la lenteur de la mise en place de mesures, ont dénoncé à l’OCIRT la situation qu’ils vivaient. L’inspection du travail a mené une enquête et a émis une série de demandes de mises en conformité, constatant, de fait, toute une série d’éléments dénoncés par les salarié-e-s et le syndicat. Le salarié Eric qui continuait à travailler dans l’entreprise a été convoqué en janvier 2024 pour une réunion professionnelle. Cette convocation s’est révélée être un guet-apens. En effet, après lui avoir reproché des faits inexacts concernant une sombre affaire de paiement de TVA sur des montres achetées par Eric, et constatant qu’il pouvait prouver sa défense, son licenciement lui a finalement été signifié pour d’autres motifs que ceux annoncés au départ. Les faits reprochés aujourd’hui pour le licenciement ne sont qu’un prétexte utilisé par les ressources humaines pour punir la personne qui dénonçait des faits, parfois graves.
Force est de constater que pas moins de 5 responsables ont été depuis déplacés, licenciés, mis en arrêt maladie etc. à la suite de l’intervention du syndicat.
Il est à noter également que la mise en place d’enquêtes internes et le recours aux personnes externes de confiance n’ont pas permis de trouver des solutions rapides pour préserver la santé des salariés-e-s.
Alarmé par le licenciement, mais très attentif au partenariat social que le syndicat maintient depuis des années avec l’entreprise, Unia a pris contact le jour même avec les RH et a demandé une rencontre urgente. Malheureusement rien n’y fait, la société restant sourde aux demandes du syndicat et aux alertes de ce dernier sur les conséquences qu’auraient le maintien d’un tel licenciement scandaleux, qui plus est avec une enquête de l’OCIRT en cours. Soucieuse du respect des articles de la CCT qui traitent du mobbing et du harcèlement, l’organisation syndicale est intervenue auprès de la Commission patronale au niveau national. Hélas! aucune solution pour une réintégration n’a été possible. Pour Unia, c’est une décision incompréhensible, abusive, et qui met à mal le partenariat social auquel il travaille depuis des années. Rolex SA, signataire de la CCT horlogerie, maintient jusqu’ici un partenariat social stable, qui allait même en s’améliorant ces dernières années à Genève. La façon de gérer cette situation et le manque de prise en compte des souffrances des salariés et des remontées du syndicat sont d’autant plus incompréhensibles.
Dénonciation OCIRT et protection des salariés
Par ailleurs, Eric et Unia ont chacun de leur côté demandé et obtenu la qualité de partie dans le cadre de la procédure à l’OCIRT. Or, Rolex SA s’est opposé aux deux demandes qui avaient pourtant été acceptées par l’OCIRT. C’est une attaque grave contre l’accès aux informations qui concernent les salarié-e-s et les membres des organisation syndicales qui en font la demande. Les dossiers sont actuellement au tribunal. Ce dossier sera particulièrement suivi par Unia car c’est une attaque grave contre les droits des salarié-e-s et les organisations syndicales du canton.
Une fois de plus, le syndicat Unia ne peut que dénoncer le manque de protection contre les licenciements dont souffrent les salariés, les lanceurs d’alerte et les délégués syndicaux et/ou du personnel. Il est urgent que le monde politique travaille avec le syndicat afin de trouver des pistes pour une meilleure protection des salarié-e-s de ce pays.
Amélioration des conditions de travail demandée
Unia et les salariés, qui ont mandaté le syndicat, en appellent à la prise de conscience par l’entreprise de son obligation de protéger la santé de ses collaborateurs et souhaitent que toutes les mesures nécessaires soient mises en place rapidement afin que de telles situations ne se reproduisent pas. Unia continuera son travail de défense des salarié-e-s et restera attentif aux suites des dénonciations à l’OCIRT. Il soutiendra tous les travailleurs et travailleuses de l’entreprise qui souhaitent continuer à se battre pour leurs conditions d’emploi.
Enfin, Unia souhaite pouvoir continuer à contribuer, via le partenariat social et le dialogue, à l’amélioration des conditions de travail des salarié-e-s et appelle l’entreprise à revenir au partenariat social ainsi qu’au respect de la CCT en ce qui concerne la prise en compte des risques psychosociaux.
Concernant Eric, Unia demande sa réintégration immédiate faute de quoi il saisira le tribunal de Prud’hommes.
Des salariés sont disposés à témoigner. Le soussigné se tient à disposition pour transmettre leurs numéros aux médias intéressés.
*Prénoms d’emprunt