Halte à la sous-traitance abusive!
- Un travail de tous les dangers sans assurance accident?
- Des salaires au mieux de 100 francs par jour?
- Des jours sans travail et sans salaire?
- Des entreprises sous-sous-sous traitantes qui tombent en faillite à répétition?
- Des entreprises principales qui ne reconnaissent aucune responsabilité?
- Des maîtres d’ouvrage qui ne se sentent pas concernés?
- Des salaires de semaines de travail qui restent impayés?
Les entreprises recourent à la sous-traitance abusive, parfois en cascade jusqu’à 3 ou 4 niveaux. Ces travailleurs, quand ils sont payés, le sont largement en dessous des conventions collectives de travail. En cas de salaires impayés, aucune autre entreprise de la chaîne ne prend la responsabilité de verser le salaire.
L’entreprise principale sait pourtant qu’elle a sous-traité des travaux à un prix si bas qu’il n’était pas possible de payer un salaire respectueux des lois en vigueur!
Cette situation inacceptable et indigne de Genève qui, dans le secteur du gros œuvre, prévaut principalement dans les métiers de la ferraille et du coffrage, les syndicats genevois de la construction SIT, UNIA et SYNA la dénoncent et la combattent depuis de nombreuses années. Aux côtés des travailleurs concernés, souvent sans statut légal et extrêmement précarisés, mais également par le biais de propositions constructives au sein des commissions paritaires et officielles dans lesquelles ils siègent.
Dans le cadre du récent conflit conventionnel dans le secteur – qui a vu notamment le 25 novembre dernier 4000 travailleurs de la construction manifester sur le pont du Mont-Blanc pour davantage de protection – et après des années de profondes divergences sur la question et de longues et difficiles négociations, les partenaires sociaux locaux, les syndicats SIT, UNIA et SYNA, d’une part, et la Société suisse des entrepreneurs (SSE-GE) et le groupement genevois des entrepreneurs (GGE) d’autre part, ont signé le 5 mars 2012 un accord historique et unique en Suisse incluant dans sa nouvelle convention collective de travail les dispositions suivantes concernant la responsabilité solidaire:
"Article IV SOUS-TRAITANTS ET ENTREPRISES BAILLERESSES DE SERVICES
1. L’entreprise adjudicataire (principale) a la responsabilité de s’assurer que tous les sous-traitants participant à l’exécution de son mandat respectent les conditions de travail et de salaire prescrites par la CN 2012 et la CCT 2012.
2. L’entreprise adjudicataire (principale), avant de conclure un contrat de sous-traitance, fait signer à son sous-traitant une déclaration de soumission à respecter les textes conventionnels en vigueur selon l’art. 356b CO au nom des parties contractantes.
L’entreprise adjudicataire (principale) co-signe les déclarations de tout sous-traitant participant à l’exécution de son mandat.
Le texte de cette déclaration de soumission figure à la fin du présent article.
3. L’entreprise adjudicataire (principale) doit en outre obtenir de tout sous-traitant participant à l’exécution de son mandat les attestations officielles listées ci-dessous prouvant qu’il est à jour avec l’ensemble de ses obligations en matière de déclaration et paiement de charges sociales:
- AVS, AI, APG, AC
- Allocations familiales (AF)
- Assurance maladie perte de gain
- Prévoyance professionnelle (LPP)
- FAR
- SUVA
- Impôt à la source ou :attestation Multipack
Si l’entreprise adjudicataire (principale) constate qu’une des attestations listées ci-dessus vient à échéance pendant le mandat, elle doit en obtenir le renouvellement.4. Les entreprises sous-traitantes ont les mêmes obligations qu’une entreprise adjudicataire à l’égard de leur propre sous-traitant.
Les entreprises de travail temporaire, bailleresses de services ou celles qui prêtent de la main-d’oeuvre, auxquelles l'entreprise adjudicataire (principale) pourrait avoir recours pour l'exécution de son mandat, sont soumises aux mêmes règles que les entreprises sous-traitantes.
5. La commission professionnelle paritaire (ci-après CPGO) peut infliger une peine conventionnelle conforme aux dispositions de l’art. 79 CN 2012 à une entreprise adjudicataire (principale) qui a failli à son devoir de surveillance et/ou à tout sous-traitant dont le soustraitant participant à l’exécution de son mandat s’avère en infraction, indépendamment de l’existence d’une déclaration de soumission, et dans le cas où ce dernier ne peut être retrouvé ou ne règle pas sa créance auprès de la CPGO.
6. L’entreprise adjudicataire (principale) a le devoir d’annoncer ses soustraitants au maître d'ouvrage et à ses représentants et de leur transmettre les déclarations de soumission ainsi que les attestations listées au point 3 ci-avant."
Or, aujourd’hui, alors que la question de la responsabilité solidaire est un sujet politique brûlant (cf récent arrêt du TF concernant l’entreprise Marti), les instances centrales de la SSE à Zürich, pour des questions purement idéologiques, refusent non seulement l’extension de ces dispositions novatrices aux travailleurs et entreprises venant travailler à Genève en provenance d’autres cantons ou de l’étranger mais également de ratifier l’accord précité signé entre les partenaires sociaux locaux.
Cette attitude est arrogante et parfaitement scandaleuse!
Arrogante dans le sens où les instances patronales nationales de la SSE bafouent les accords trouvés sur le plan local par les partenaires sociaux après de longues négociations et les nouveaux droits acquis des travailleurs genevois, lesquels, précisons-le, ont stoppé leur mouvement de lutte en raison justement de ces accords.
Scandaleuse car parfaitement conscientes des conditions de travail inacceptables que vivent de nombreux travailleurs de la construction victimes de la sous-traitance sauvage, les instances nationales de la SSE préfèrent, pour des questions purement idéologiques, encourager le maintien d’un système devenu quasi mafieux au mépris de la santé des ouvriers concernés.
Les syndicats genevois, SIT, UNIA et SYNA dénoncent fermement l’attitude irresponsable des instances centrales de la SSE et la tiendront directement responsable des drames qui pourraient se produire à l’avenir sur ces chantiers de la honte ; drames qui nous paraissent inévitables!
A travers des cas concrets parfaitement illustratifs, les syndicats alertent les médias et l’opinion publique sur la gravité de la situation concernant la sous-traitance abusive quasiment généralisée sur les chantiers genevois et l’urgence que les accords conclus à Genève soient sans délais ratifiés afin de pouvoir commencer à lutter efficacement contre ses effets dévastateurs.