La face cachée du luxe : Des travailleuses et des travailleurs témoignent en faveur du salaire minimum

A six semaines du vote pour le salaire minimum, des travailleuses et des travailleurs de l’industrie genevoise du luxe ont témoigné de leur difficulté quotidienne de vivre avec des salaires de moins de 4000 francs. Leurs récits issus d’un monde d’abondance et de richesse – production de services et de biens haut de gamme, commerce de bijoux, travail dans des hôtels cinq étoiles – contredisent la propagande patronale d’une destruction massive d’emplois en cas d’acceptation de l’initiative syndicale. Leurs employeurs ne sont en effet pas « des petits patrons de PME » mais bien des entreprises qui privilégient les bénéfices pour les actionnaires et propriétaires au détriment d’un salaire décent pour leurs salariés. Ces derniers ont appelé à voter OUI le 18 mai prochain.

Elles et ils s’appellent Lucia, Antonio, Iris et Emma (prénoms d’emprunt) et travaillent depuis plusieurs années dans différentes branches de l’industrie genevoise du luxe, comme femme de chambre dans un hôtel 5 étoiles, comme ouvrier dans une usine de chocolat haut de gamme, comme nettoyeuse dans une banque privée et comme employée d’un commerçant de bijoux. À visage couvert, par peur de perdre leur emploi, ces personnes ont aujourd’hui décidé de témoigner de leur difficulté quotidienne de vivre avec des salaires situés entre 3400 et 3800 francs pour un plein temps.

 

Avec de tels salaires, impossible de rêver d’une nuit dans une chambre d’hôtel à 1500 francs, d’acheter des chocolats de luxe, des bagues ou des stylos à plusieurs milliers de francs. Mais les problèmes pour ces travailleuses et travailleurs sont bien plus réels: la peur, chaque mois, que leur enfant tombe malade et qu’il faille trouver de l’argent pour sa garde ; la visite chez le dentiste, mille fois repoussée pour ne pas devoir assumer des coûts imprévus ; le choix, chaque semaine, entre un pantalon pour sa fille ou des chaussures pour son fils.

 

On est bien loin de l’image portée par les adversaires d’un salaire minimum à 4000 francs. Ces employeurs ne sont en effet pas « des petits patrons de PME », qui seraient obligés de licencier massivement en cas d’acceptation de l’initiative syndicale, mais bien d’entreprises qui privilégient les bénéfices pour leurs actionnaires au détriment d’un salaire décent pour leurs salariés. Ainsi, à titre d’exemple, en 2013 les hôtels cinq étoiles comptabilisent à eux seuls à Genève un chiffre d’affaire de 500 millions de francs. Les banques installées à Genève, qui sous­-traitent les services de nettoyage à des entreprises payant 18,20 francs de l’heure, contribuent quant à elles au PIB genevois à hauteur de plus de 9 milliards de francs. Pour Caran d’Ache, on estime le chiffre d’affaires à 100 millions de francs, tandis que le chocolatier Favarger a vu augmenter le sien en 2013 de 40%. Ces deux entreprises pratiquent des salaires en dessous de 4000 francs.

 

Face à de telles réalités, le syndicat Unia dénonce la propagande patronale mensongère, centrée sur le chantage à l’emploi visant à créer un climat de peur auprès des salariés de ce pays. C’est oublier un peu vite qu’une grande partie des employeurs, dans les branches à bas salaires, ont largement les moyens d’assurer une augmentation des revenus de leurs employés qui ne dépassera pas, en cas d’acceptation de l’initiative, une moyenne de 0,5% de la masse salariale totale. C’est oublier aussi que dans les branches avec conventions collectives de travail, l’instauration de salaires minimums de branche n’ont suscité, ces dernières années, aucune suppression de place de travail. C’est oublier finalement que la plupart de ces emplois ne sont pas « délocalisables » ; et que ce n’est pas demain que les banquiers privés commenceront à nettoyer leurs bureaux.




Pour contact:
Alessandro Pelizzari, secrétaire régional Unia